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L’ère du shapewear désirable commence

Longtemps considérés comme vieillots, les sous-vêtements sculptants séduisent de nouvelles clientes aussi décomplexées que féministes. Même pour sortir !

De l’antiglamour

Juste avant un rendez-vous amoureux, Bridget Jones hésite entre un string noir et une inconfortable culotte « de grand-mère » couleur chair, pour camoufler son ventre. Le shapewear, c’est ça : des sous-vêtements pensés pour gainer, aplatir le ventre ou « lisser » les formes (« shape » en VO). Antiglamour et pas franchement considéré comme féministe, le style connaît pourtant, cette année, un engouement inattendu.

L’historienne Catherine Örmen rappelle que cette mode n’est pas nouvelle et qu’elle a évolué en même temps que les innovations en matière de lingerie : « Dans les années 1930, les gaines sans coutures tenaient notamment le ventre et soutenaient la poitrine. Dans les années 1980, la révolution de l’élasthanne a lancé la mode des bodys, puis sont arrivées les microfibres qui ont permis de fabriquer des sous-vêtements minimalistes, presque insoupçonnables. »

Depuis, le shapewear est devenu un vrai business. Au début des années 2000, Sara Blakelyfonde Spanx, une marque spécialisée. Une décennie plus tard, l’Américaine devient milliardaire et se hisse parmi les 100 personnes les plus influentes selon le magazine « Time »

Au vêtement féministe

À l’origine de ce retour sur le devant de la scène ? Kim Kardashian. En 2019, la vedette de télé-réalité et influenceuse lance Skims, une marque qui promet de trouver des « solutions pour tous les corps » – aujourd’hui valorisée à plus de 1 milliard de dollars. Ce sont des shorts, des bodys et des culottes qui affinent la taille et remontent les fesses. L’Américaine mise sur le caractère inclusif de sa collection en proposant des produits dans une large palette de teintes et de tailles (du XXS au 5XL). Les prix ? Environ 70 euros pour un body, et 40 euros pour une culotte.

La marque, à l’image épurée, presque « clinique », se retrouve en vente sur des sites d’e-commerce pointus comme SSense ou Net-A-porter, et elle est désormais proposée aux Galeries Lafayette Haussmann, à Paris. « Skims a réussi à rendre glamour un vêtement qui était tout sauf sexy », décrypte Alexandra Jubé, fondatrice du bureau de style du même nom.

« Les femmes et jeunes femmes n’ont plus honte de montrer leurs dessous. Le shapewear est devenu désirable. » Chez Lyst, une plateforme dédiée à la mode, les recherches concernant le shapewear auraient augmenté de 96 % entre 2020 et 2021.

L’idée cachée derrière tout ça : une certaine performance du corps. » Skims avait d’ailleurs, lors des derniers jeux Olympiques, habillé de ses sous-vêtements l’équipe américaine de gymnastique.

Pour Soveria Mendella, le shapewear n’est pas exempt de paradoxes : « Dans cette mode coexistent à la fois une envie d’uniformisation et un désir de singularité car c’est le vêtement qui s’adapte au corps. » Avec cette revendication toute féministe : « C’est mon corps et j’en fais ce que je veux. »

Comment le porter ?

L’esthétique autour du shapewear, qui n’a jamais été aussi visible qu’aujourd’hui, s’invite aussi sur les podiums. Cette saison, les designers imaginent des combinaisons ultra-moulantes, à manches longues et hyper confortables. Des pièces semblables à des armures. De quoi nous inspirer pour nous façonner des looks sportswear et dans l’air du temps, en associant un body col roulé ou décolleté à un jean brut. On peut également mixer un legging ou un short moulant avec un blazer oversize ou oser la combinaison avec des sneakers.

 

ELLE, Cora Delacroix, 12 novembre 2021