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Vous pourrez vous y promener dès 2024 en plein Paris

La consultation vient de commencer pour la plantation de la place de Catalogne (14e)

Lors de la dernière campagne municipale, Anne Hidalgo avait promis – sous les lazzis – de planter trois « forêts urbaines » dans la capitale. Le projet situé derrière l’Opéra Garnier a été abandonné

« À cause de la complexité du sous-sol », explique Emmanuel Grégoire, le premier adjoint chargé de l’urbanisme, car « ça coûterait, beaucoup trop cher ». Celui sur le parvis de l’Hôtel de Ville « se fera » mais a été revu à la baisse. Quant à celui devant la gare de Lyon, il est encore « à l’étude ». En atten­dant, d’autres « aménagements forestiers » se préparent à sortir de terre place du Colonel-Fabien et, en pole position, place de Catalogne.

La première forêt urbaine de Paris verra donc le jour à deux pas de la gare Montparnasse, en 2024. La mairie a organisé jeudi soir la « réunion publique de lancement » (sur Internet) afin de soumettre à la concertation le projet pour la place de Catalogne. Conçue dans un style néoclassique monumental par l’architecte catalan Ricardo Bofill au mitan des années 1980, cette place hyper-minérale ressemble aujourd’hui à un vaste rond-point bordé d’immeubles à colonnades. En son centre, une fontaine inclinée de 50 mètres de diamètre dessinée par le sculpteur polonais Shamai Haber dénombre 300 000 pavés de granit. Non accessible, elle ne fonctionne plus depuis vingt ans.

Plus de 1 hectare boisé

« La place de Catalogne est un lieu assez inhospitalier, infranchissable en son centre, observe Christophe Najdovski, l’adjoint chargé de la végétalisation de l’espace public, des espaces verts et de la biodiversité. On n’y fait que passer. C’est pourquoi nous envisageons une reconfiguration globale autour d’une mini-forêt urbaine. Nous avons avancé plus vite sur ce site car le sous-sol contient peu de réseaux souterrains, permettant de dégager une surface plantable en pleine terre. C’est rare à Paris. »

Les travaux de désamiantage doivent démarrer en novembre. Le giratoire automobile sera remplacé en 2022 par un agencement en fer à cheval, au nord, entre les rues Vercingétorix et Alain, comme à Bastille ou à République. La par­tie sud sera piétonnisée, rattachée à l’îlot central et envahie par la végétation à compter de 2023. Coût de l’opération, comprenant la pérennisation de la coronapiste :

9,6 millions d’euros. « Ce montant correspond à la création d’un jardin », précise l’élu écologiste. Le projet couvre 11600 mètres carrés – plus de 1 hectare -, dont 2 200 doivent être végétalisés. Le ratio retenu s’établit à « 10 arbres et 40 arbustes pour 100 mètres carrés », soit 220 arbres et 880 arbustes au minimum. L’indice de canopée, c’est-à-dire la proportion d’ombre portée du feuillage sur le sol, devra être « d’au moins 60 % de la surface plantée », pour une moyenne de 21 % à Paris, ce qui signifie une végétation dense, bien plus serrée que des arbres d’alignement.

« Nous nous inspirons des travaux de Michel Desvigne [célèbre paysa­giste français] qui a déjà réalisé ce type de projet au Japon, notamment », indique l’adjoint. L’écosystème créé ici doit pouvoir se développer « par lui-même, avec peu d’entretien ». L’en­semble du site boisé n’a pas vocation à être accessible au public ; 50 % sera « mise en défens » : les promeneurs pourront profiter d’un « parcours en lisière », voire traverser la mini forêt par un « cheminement balisé ». Deux projets ont été présentés aux habitants lors de la première réunion de concertation, l’un doté de sentiers traversants, l’autre non.

Rafraîchir l’air ambiant

Les « bénéfices attendus » de la future oasis sont principalement liés au changement climatique (l’ombre et l’humidité de la végétation rafraîchissent l’air ambiant), mais aussi Jà la pollution atmosphérique, ou encore à « l’amélioration du bien-être des riverains ».

Les quelque 70 participants à la réunion de lancement n’ont pas remis en question le principe de forêt urbaine. Certains soutiennent l’idée de transformer la place. Mais d’autres se montrent extrêmement critiques sur le plan de circulation, les nuisances de chantier, la disparition de la fontaine… « Du pur vandalisme !», éructe un habitant excédé, qui semble partager les griefs de #SaccageParis à l’encontre de la municipalité. Christophe Najdovski, lui, soupire : « Il y a toujours des gens qui sont contre tout. Mais ce projet-là est vital, tout comme la végétalisa­tion massive de la ville, la désimperméabilisation des sols, la création de 300 îlots de fraîcheur à Paris d’ici à 2030, si on ne veut pas que notre ville devienne un four invivable. »

 

Le journal du dimanche, Bertrand Gréco, 24 octobre 2021