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Le monde a changé, le rapport annuel est à la traîne. Découvrez les nouvelles pistes…

Le rapport annuel est dans nos métiers du « corporate » un exercice imposé qui a finalement peu évolué et souffre encore d’un conformisme congénital. Et les aménagements récemment apparus de type « rapport intégré », quand ils n’ont pas appauvri par trop de normes, concept et créativité, se révèlent plutôt être un exercice contraint. 

 

Un rapport annuel, pour quoi faire ?  

C’est que le rapport annuel est assurément l’outil le plus stratégique qu’une entreprise adresse à ses parties prenantes : il porte la vision, les enjeux, la raison d’être, les engagements et, bien sûr, les résultats financiers de l’entreprise. Dans le même temps, il se doit d’expliquer, d’impulser, de rassurer, de convaincre de la validité, de la pérennité de la stratégie entrepreneuriale suivie.

Un cahier des charges d’autant plus dense et complexe qu’au fil du temps le rapport annuel en est venu à faire office de document institutionnel unique et, par suite, à dépasser la sphère financière pour laquelle il était originellement conçu pour s’ouvrir aux leaders d’opinion, à la presse, aux salariés, aux candidats, voire aux clients et partenaires… Et tout cela sur un rythme annuel.

Bref, rater l’exercice peut s’avérer une erreur stratégique pour qui veut rendre son entreprise lisible auprès de ses publics, exercice d’autant plus important en période de crise. Si l’on en croit les différentes études publiées sur les rapports annuels de l’année écoulée, on est frappé par l’immobilisme en ce domaine. Bien sûr, les sujets consacrés à la crise, à la capacité de résilience des organisations, au besoin de transformation et de projection vers l’avenir sont présents afin de montrer la prise de conscience, la capacité de résistance et donner des preuves de réassurance. Mais après 18 mois de bouleversements profonds où l’on nous a prédit « le nouveau monde d’après », rien ne semble pouvoir ébranler ce sacro-saint temple de la communication corporate ! Et pourtant…

Repenser le rapport annuel comme on se doit de repenser l’entreprise

Doit-on cantonner le rapport annuel à des ajustements à la marge ? Doit-on juste être en réaction face aux changements présents ou annoncés ? Doit-on continuer à raconter l’entreprise dans ses « anciennes » dimensions (gouvernance, stratégie, réalisations, métiers, RSE, résultats) via les mêmes médias (print et web et AG pour certains) ? Dans un monde en transformation où la totalité des frontières doit être revue et repensée, il s’agit plutôt de changer de paradigme et d’inventer de nouvelles expériences.

A ce titre, l’exemple de l’industrie avec le développement des « digital twin ou shadow device » peut être source d’inspiration pour notre réflexion : comment ne plus opposer réel et virtuel ? Comment mieux comprendre le monde réel grâce aux développements des nouvelles technologies ? Comment proposer de nouvelles expériences où chaque public devient acteur et partie prenante d’un nouveau dialogue ?

Pour le rapport annuel, il s’agit de proposer un nouveau mode de connaissance et de compréhension de l’entreprise : plus immersif, plus interactif, plus accessible. C’est ce que nous voulons faire, fort de nos intuitions et de l’observation des expériences en cours dans le domaine du livre et des datas associées à nos habitudes de lecture, ou encore via les fonctionnalités issues du développement spectaculaire des technologies digitales, les métaverses ayant déjà infusés chez une partie de la population. Les études émergentes sur l’anthropologie digitale sont également éclairantes sur le sujet.

Vers une immersion sensible, réelle et virtuelle

Le rapport annuel en tant qu’outil essentiel de la stratégie de l’entreprise ne disparaitra pas mais s’il veut continuer à être « le véritable média institutionnel ET utile » de celle-ci, sa forme va connaître des bouleversements considérables pour rendre compte des vraies évolutions des organisations. Il devra refléter l’entreprise dans toutes ses facettes et toute sa richesse en développant des stimuli, des univers, des expériences uniques. Le caractère d’une personne s’explique moins qu’il ne se ressent, on pourrait le dire également d’une entreprise. A chacune de trouver le medium de transmission idéal.

Le rapport annuel se doit de refléter l’unicité de l’entreprise, sa singularité, ses différences vs le sempiternel quatuor « gouvernance, stratégie, activités, engagements ».

Le rapport annuel devenant un guide de lecture de l’univers de référence, il organisera un véritable « voyage » au cœur de l’entreprise, et sera en lui-même une expérience du vivre, du ressentir de l’entreprise. Dans cette hypothèse, le texte sera un guide, un mode d’emploi intelligent, en capacité de nous faire découvrir, vivre, percevoir, interagir avec l’entreprise. L’essentiel sera ailleurs, dans l’expérience immersive proposée que chacun pourra construire.

Si aujourd’hui le déploiement digital du rapport annuel se tient dans un rapport 20/80 par rapport au print, à trois ans ce rapport sera inversé. Et par suite, l’exercice du rapport annuel bouleversé. C’est le sens de l’histoire, et finalement, il nous séduit puisqu’il permet de fuir l’immobilisme, la répétition et l’inefficacité.

Le rapport annuel dont l’objectif est finalement de convaincre et surtout de séduire pour engager ses parties prenantes continuera donc pleinement à remplir son rôle. Il ira beaucoup plus loin dans l’expression de sa promesse. Si bien sûr, l’exercice est réussi.

 

L’ADN, Olivier Breton, 27 octobre 2021