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Le Caire plus écolo que l’Europe

L’architecte italien Stefano Boeri poursuit son œuvre pour la végétalisation des villes. A l’est de la capitale égyptienne, trois « forêts verticales » s’élèveront dans le nouveau quartier administratif.

 

Pourquoi la ville du Caire vous a-t-elle demandé de construire ces bâtiments ?

C’est en réalité un développeur indépendant, MISR Italia, qui nous a demandé de concevoir ce projet. Nous nous sommes inspirés de nos créations précédentes, en Italie, aux Pays-Bas et en Chine, qui visaient à intégrer une nature vivante dans l’architecture. Nous les avons réinterprétées en tenant compte du contexte du Caire.

Avez-vous été obligés de choisir certaines plantes plutôt que d’autres ?

Chaque “forêt verticale” est unique. Même si le concept des trois cubes est le même que celui que nous avons développé à Milan, ces structures sont conçues pour répondre à différents besoins, notamment en eau, et tiennent compte des conditions climatiques. Nous travaillons avec des ingénieurs, des experts de l’environnement et des botanistes car notre première démarche consiste à sélectionner les plantes qui seront le plus adaptées à l’endroit où le bâtiment sera édifié. Elles sont issues de l’environnement où sera construite notre “forêt verticale”, dans le but de minimiser l’impact de l’entretien et de réduire les frais. Cela permet aussi de favoriser la biodiversité en respectant l’écosystème local, et de rendre ainsi nos projets durables. C’est seulement à ce stade que nous réfléchissons au dessin de nos façades et à l’architecture de manière à ménager l’espace idoine entre les différents balcons pour respecter l’évolution tridimensionnelle de chaque type de plantes. Nous dessinons des maisons pour des arbres qui accueillent aussi des humains.

Votre projet consiste aussi à reverdir d’autres quartiers, en végétalisant des toits et des façades. Quelle sera l’ampleur de cette transformation ?

Lorsque nous acceptons un nouveau projet, nous regardons l’environnement urbain dans lequel il se situera. Au cours des discussions avec notre client, nous avons vu la possibilité de proposer un ensemble plus vaste : un Caire vert. En travaillant sur une végétalisation des toits et en créant des corridors permettant de relier les espaces verts déjà existants. MISR Italia a choisi de nous aider à poursuivre dans cette voie. Le Caire pourrait ainsi devenir la première métropole d’Afrique du Nord à affronter le défi du changement climatique et de sa reconversion écologique. Mais nous en sommes encore à un stade préliminaire.

Vos immeubles sont, par définition, grands consommateurs d’eau. Comment gérez-vous cette “contradiction” entre un immeuble vert et propre et la quantité d’eau supplémentaire qu’il nécessite ?

C’est un point auquel nous sommes très sensibles, bien évidemment. D’ordinaire, nous travaillons avec Transsolar KlimaEngineering, une société allemande, et nos botanistes pour sélectionner les plantes les moins gourmandes en eau. Nous avons beaucoup appris de nos constructions passées dans d’autres lieux arides et chauds, comme l’Arabie saoudite ou le Mexique. Au Caire, nous collaborerons avec une nurserie botanique locale, chargée de suivre toutes les phases de sélection des plantes et leur préparation pour maintenir le niveau minimal d’apport en eau.

Paris Match, Romain Clergeat, 2 février 2022