La crise de l’énergie pourrait bien être un accélérateur de la semaine de 4 jours, comme le Covid l’a été pour le télétravail

Pour Bruno Mettling, le développement rapide de la semaine de 4 jours est inéluctable. Car l’enjeu de performance économique pour les entreprises permet une baisse de la facture énergétique, meilleure productivité individuelle et va de pair avec une amélioration de la qualité de vie au travail et le souci de la planète.

Inspirées par les expérimentations islandaises et japonaises et leurs impacts positifs sur l’efficacité productive, 5% des entreprises françaises, selon un sondage ADP de mai 2022, ont aujourd’hui adopté le modèle de la semaine de 4 jours, et nombreuses sont celles qui s’y intéressent.

A l’heure où le recrutement et la fidélisation constituent un défi majeur, les bénéfices avancés sont une meilleure qualité de vie au travail, facteur majeur d’attractivité … Les détracteurs, eux, pointent les risques en termes de charge de travail et de santé mentale, évoquent le délitement du lien social et du lien au travail ou pointent l’inéquité sectorielle.

En clair, les conditions sont réunies pour reproduire le débat stérile post-Covid entre conservateurs hostiles par principe au télétravail et thuriféraires du full remote, refusant les uns et les autres d’en voir les limites.

L’aménagement du télétravail

Si l’on veut bien poser le débat, de manière pragmatique, plusieurs points semblent rendre inéluctable le développement rapide de la semaine de 4 jours.

La semaine de 4 jours

Une première voie consiste à aménager les accords de télétravail pour concentrer la présence sur site des salariés sur 4 jours. Cette approche suppose la capacité et le niveau de confiance nécessaires pour inviter les salariés au télétravail le lundi ou le vendredi. S’il ne s’agit pas de réduire l’empreinte immobilière de l’entreprise, les économies d’énergie sur un site vide 3 jours consécutifs sont, quant à elles, mécaniques. Cette voie permet de renforcer le lien social avec l’alignement des jours de présence sur site.

Si la voie de la semaine « stricte » de 4 jours avec un temps de travail hebdomadaire de 32 heures paraît à date inadaptée à de nombreux secteurs d’activité déjà en déficit de personnels et à la productivité fragile, elle peut toutefois être envisagée dans certaines situations exceptionnelles, y compris dans un nouvel équilibre temps libre-rémunération.

Concentrer 5 jours de travail en 4

Pour les entreprises qui le peuvent, en particulier les grandes structures assumant déjà un fonctionnement hybride, une organisation du travail concentrant sur 4 jours ce qui est aujourd’hui réalisé en 5 jours peut être envisagée.

« La crise du Covid-19 a cassé l’habitude du commande et contrôle »

En fonction des secteurs d’activité et des métiers, cela passerait par l’extension des plages horaires et par l’optimisation en profondeur des modes de fonctionnement.

Le pari est d’accompagner le mouvement de « chasse au gaspi organisationnel » amorcé avec le développement du télétravail, comme les fameuses réunions non productives mais aussi les pratiques bureautiques inappropriées, pour faire rimer cette nouvelle organisation du travail avec une hausse de la productivité.

Face au désengagement des salariés, au déficit d’attractivité ou aux irritants du quotidien au travail, proposer la semaine de 4 jours comme une « expérience collaborateur » conjuguant productivité et équilibre vie privée-vie pro est un avantage concurrentiel majeur.

En 2023, les enseignements d’un essai international mené à grande échelle sur la semaine de 4 jours devraient nous apporter des éclairages intéressants sur la productivité, l’impact environnemental ou encore le suivi de l’égalité entre les sexes. D’ici là, les expérimentations au sein chez Accenture France ou TotalEnergies seront suivies attentivement par la sphère RH… et par les 64% de salariés français motivés par cette organisation revisitée du travail.

L’ADN, Laure Coromines, 1 septembre 2022