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La capitale mondiale est en France et c’est… ?

Fière de son héritage culturel, reconnu par l’Unesco, et résolument tournée vers l’innovation, la ville de Dijon est aujourd’hui une figure de proue de la gastronomie et du vin en France et dans le monde.

Que la fête commence ! François Rebsamen attend ce moment depuis dix ans.

« Nous y sommes », tranche­t-il à quelques jours de l’inauguration : le 6 mai de la Cité internationale de la gastronomie et du vin (CIGV). Un projet cœur de ville qu’il a porté à bout de bras avec les maires des 23 communes de la métropole.

Le jour J, le maire de Dijon pourra compter sur la présence d’un millier d’invités de marque et d’Emmanuel Macron « s’il peut se libérer » ainsi que de son prédécesseur à la tête de l’État, François Hollande. Au passage, la ville aux cent clochers s’offre un nouvel ouvrage embléma­tique : « le canon de lumière » inspiré de l’antenne de Beaubourg à Metz. « C’est l’aboutissement d’un projet touristique exemplaire qui célèbre l’art de vivre à la française et qui fait de Dijon la destination internationale du bien vivre et du bien boire », s’enflamme l’édile qui n’a cessé de jouer les VRP pour le faire aboutir. Tout a démarré trois ans plus tôt.

En fait, quatre villes ont été qualifiées pour promouvoir des CIGV : Dijon, Tours, Rungis et Lyon. Dix ans plus tard, Dijon a fini par coiffer ses rivales au poteau. Bien que Lyon ait ouvert le bal en 2019. Mais sa cité a dû refermer ses portes neuf mois après son ouverture.

« Aujourd’hui, Dijon est le seul projet abouti et qui met en valeur la ville tout en redonnant vie à l’hôpital du Saint-Esprit créé en 1204 », livre Jean-Robert Pitte. De quoi cette cité est-elle le nom ? À écouter François Rebsamen, c’est un tiers-lieu fait de quelque 800 logements, d’un Cineplex de neuf salles (Pathé), d’un hôtel (Hilton by Kurio) et d’un ensemble d’ouvrages neufs ou réhabilités célébrant l’art de vivre dans toutes ses dimensions. Le tout déployé sur plus de 1 700 mètres carrés. « À terme, quelque 400 emplois seront créés pour faire fonctionner la cité et 600 emplois ont été mobilisés sur le site pour en achever la construction malgré la crise sanitaire », pointe le maire de Dijon. Autre source de fierté : avoir bouclé le projet à 90 % sur fonds privés.

Sur les 250 millions d’euros engagés pour le projet, l’État n’a contribué qu’à hauteur de 3 millions, la ville 5 millions et la Région Bourgogne-Franche-Comté 7 millions.

« C’est un lieu de vie et d’expérience sensorielle »

Bâtisseur du viaduc de Millau et troisième major française du BTP, le groupe Eiffage a financé à lui seul les deux tiers du projet. La CIGV est son plus gros chantier régional en France. Un chantier mené main dans la main avec le promoteur immobilier grenoblois K-Rei dirigé par William Krief. Le groupe a investi plus de 50 millions d’euros dans le parc et possède 70 % des espaces dévolus à l’accueil du public sur le parcours visiteurs. « La CIGV nous a obligés à sortir de notre modèle classique de foncière fondé sur des baux de long terme », appuie William Krief. Surtout, le groupe s’est doté d’une filiale nommée « Village gastronomique ». « En 2019, pris de passion pour le projet, nous sommes passés de l’autre côté du miroir en devenant animateurs d’espaces commerciaux », poursuit l’entrepreneur. Le village gastronomique, son premier site, accueillera une dizaine de commerces de bouche à sa marque dans des espaces prééquipés.

Son second site, baptisé « La Cuisine expérientielle », ambitionne de devenir un « poumon d’animation permanent » consacré à l’événementiel et à la dégustation de vins et de mets, et un lieu de pédagogie sur le bien manger pour les groupes scolaires. William Krief en attend aussi des retombées économiques. « Nous trouverons notre rendement à partir de 1 million de visiteurs », calcule le patron de K-Rei, qui mise sur le flux touristique habituel de la ville.

En 2019, Dijon avait attiré 3,3 millions de personnes, soit davantage que Montpellier. À croire que l’enthousiasme est communicatif. Julien Bernard, aux commandes du groupe Épicure, attend aussi beaucoup de la Cité gourmande. Son groupe a investi 6 millions d’euros pour exploiter deux restaurants et les caves de la cité.

Et l’aventure bourguignonne continue avec un restaurant « vinostronomique » dont la direction culinaire a été confiée au chef étoilé Eric Pras. Et un menu raisonnable allant de 50 à 70 euros. Autre offre culinaire : leur bar à vins (Le Comptoir de la cité) proposera des produits du terroir et de saison et des repas à emporter. La Cité du vin quant à elle occupera un espace de 600 mètres carrés où seront proposés 250 vins au verre. Chaque visiteur pourra avec son billet d’entrée déguster un vin rouge et blanc et repartir avec le verre. Connu pour ses campus, le groupe Ferrandi Paris (dans le giron de la chambre de commerce et d’industrie de Paris-Île-de-France) est aussi de la partie.

Présentes à Bordeaux et Rennes en dehors de la capitale, ses écoles de cuisine et de pâtisserie de luxe seront hébergées sur 850 mètres carrés dans le canon de lumière. « Nos formations destinées à des élèves et à des adultes sur des formats courts auront une teinte plus régionale », précise son directeur général Richard Ginioux. Ce dernier espère aussi louer dès l’an prochain des locaux à proximité pour héberger une école de management hôtelier et de restauration.

« La CIGV est à la fois un lieu de vie, d’expérience sensorielle et une formidable vitrine nationale et internationale pour nos deux plus grands vignobles », remarque-t-il. De quoi apporter encore plus … d’eau au moulin de François Rebsamen. « Au printemps 2024, nous accueillerons dans un hôtel particulier de Dijon l’ONU du vin », formule l’édile. L’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV), qui regroupe les 50 plus grands pays viticoles au monde, célébrera alors son centenaire. Que la fête continue !!

LE JOURNAL DU DIMANCHE, Bruna Basini, 30 avril 2022